Accueil > Télémédecine : psychologue en EHPAD, elle a testé, elle témoigne

Pouvez-vous présenter, vos missions, votre établissement ou structure ?

L’EHPAD AGIR accueille 72 résidents. Mon rôle est d’accompagner les résidents et familles, en individuel et en collectif, ainsi que de sensibiliser les professionnels sur les thématiques de la psychogériatrie.

A Puylaurens, nous accueillons 70 résidents. Mon rôle là aussi est d’apporter un soutien aux résidents, familles et personnels de l’équipe.

Depuis quand utilisez vous la plateforme de télémédecine TéléO et dans quelles situations ? Quels en sont vos usages ?

 J’ai commencé à utiliser TéléO en mode expérimental dans le cadre du programme PASTEL. Cela fait maintenant 6 ans que j’utilise pleinement le logiciel. Toute l’équipe est sensibilisée à cette utilisation.

J’utilise TéléO pour la gestion de situations complexes, médicalement ou comportementalement. Nous sollicitons principalement l’équipe de gériatrie du CHIC. Cela passe par l’accord du médecin traitant du résident.

La famille du résident est systématiquement informée. L’usage de TéléO et de la téléconsultation est noté dans le livret d’accueil de l’établissement et fait partie du contrat de séjour.

Pour les téléconsultations ou téléexpertises, nous faisons participer un infirmier et un aide-soignant. Cela permet d’exprimer les difficultés rencontrées dans la prise en soins. C’est aussi un bon moyen pour impliquer l’ensemble de l’équipe.

Nous avons pu voir les équipes monter en compétences grâce aux échanges avec les médecins gériatres. Il y a un vrai partage de compétences, c’est une vraie plus-value pour nous tous. En effet, en tant que psychologue, j’ai acquis des compétences autour de la compréhension des effets secondaires médicamenteux afin de mieux observer et accompagner les troubles du comportement lorsque l’approche non médicamenteuse n’est pas suffisante.

Parfois, mes collègues infirmiers sont amenés à faire appel à des télé expertises sur des cas complexes de pansement, en envoyant des photos pour permettre la mise en place de protocoles spécifiques.

Enfin, lors de douleurs très aigües avec prises en soins complexes, le médecin traitant peut nous demander un appui par télé-expertise pour éviter de déplacer le patient et permettre ainsi une prise en soins plus ciblée et donc plus personnalisée.

Combien de téléconsultations réalisez vous par mois ?

En 2023, sur l’EHPAD AGIR nous avons réalisé 28 téléconsultations. Ce qui correspond à environ 2 par mois. A Puylaurens, nous en faisons environ 1 par mois.

Que la plateforme TéléO vous apporte-t-elle au quotidien ?

Il y a plusieurs bénéfices :

  • Cela nous permet d’obtenir des RDV plus rapidement, par exemples : pour organiser des hospitalisations de jour, pour regrouper plusieurs RDV (exemple : scanner IRM) sur la même journée.
  • Cela évite les hospitalisations :
    – en adaptant les traitements médicamenteux et non médicamenteux,
    – en aiguillant le médecin traitant sur de nouveaux traitements,
    – en faisant du préventif, pour prévenir l’augmentation des troubles du comportement.

Après une téléexpertise, nous reprogrammons, si nécessaire, un point au bout d’un mois. Cela permet de voir comment a évolué la situation et de réadapter si nécessaire notre prise en soins tant médicalement, comportementalement, qu’au niveau non médicamenteux.

Il est important de voir les télé expertises comme l’accès direct à des experts médicaux nous permettant un avis extérieur, de prendre du recul, d’analyser notre prise en soins par les équipes pluriprofessionnelles pour répondre au mieux aux situations les plus complexes.

Pouvez-vous nous décrire concrètement comment vous utilisez TéléO ?

Je recueille les données sur le résident : les transmissions des 15 derniers jours, traitements médicamenteux, les pathologies, un NPIES (test troubles du comportement). Je prépare cet exposé de la situation en amont de la téléconsultation.

Je me connecte à TéléO avec mon identifiant. Il me faut 10 minutes maximum pour créer le dossier patient. Je remplis seulement les champs obligatoires avec l’astérisque rouge. Il est important de bien décrire la situation. J’indique ce que l’on attend de la téléexpertise.

Je télécharge les documents dans TéléO et je coche nos jours de disponibilités, tout autant pour moi en tant que psychologue, pour le médecin coordinateur et l’infirmière coordinatrice. J’envoie ensuite la demande. En général, j’ai un retour sous 1 semaine.

Nous avons une salle télémédecine dédiée avec un écran, car cela était nécessaire avec l’ancien système. Avec la nouvelle version TéléO, nous pouvons simplement utiliser un ordinateur portable avec une caméra.

En tant que psychologue, je peux facilement remplir le dossier de demande (après avoir obtenu l’accord du médecin et de la famille), mais mes collègues IDEC, médecin coordinateur, ou IDE peuvent eux aussi remplir la demande : il suffit de l’avoir pratiqué une fois pour en comprendre rapidement son utilisation.

Comment est perçu TéléO par le reste de votre équipe ?

Je suis perçue comme la référente TéléO car je l’utilise depuis plusieurs années. Le médecin coordonnateur et l’IDEC sont tout autant à l’aise pour monter le dossier et mener à bien une télé-expertise.

Sur l’EHPAD de Puylaurens où je n’ai pas actuellement de médecin coordinateur, TéléO est un outil encore plus précieux car les télé-expertises nous permettent, à l’ensemble de l’équipe, d’avoir un avis complémentaire. De plus, nous pouvons recevoir les ordonnances sur le logiciel ou via Medimail, pour faciliter notre travail et celui du médecin traitant.

Lors de réunions pluridisciplinaires, l’équipe a le réflexe de proposer une téléconsultation pour une situation. L’initiative vient aussi bien des infirmiers que des aides-soignants. C’est facilitant et cela apporte des solutions rapides, une réflexion, de la prise de hauteur.

La téléconsultation a pu nous permettre de désamorcer des situations complexes avec des familles qui refusaient un diagnostic. Le fait d’entendre et d’échanger avec un spécialiste a facilité les échanges.

Etes-vous arrivée à embarquer l’équipe de l’EHPAD à l’usage de TéléO ? Comment avez-vous fait ?

L’équipe a vite été réceptive à l’usage de TéléO.

L’inquiétude était la question du temps. Les soignants craignaient que cela prenne trop de temps mais il n’y a pas de temps perdu car ce temps dédié va permettre une meilleure prise en soins du résident.

Avez-vous rencontré des difficultés dans la mise en place du dispositif ? Si oui, comment avez-vous fait pour les contourner ?

Tout fonctionne normalement aujourd’hui. Au début, nous avons rencontré des problèmes techniques de connexions avec internet, des difficultés avec le son, la caméra.

Comment la plateforme vous a-t-elle permis de renforcer les liens avec l’équipe de gériatrie ?

Cela a permis de mieux faire connaitre notre fonctionnement, ainsi que la spécificité de chaque établissement, certains s’orientant sur le non médicamenteux, ou d’autres EHPAD sur d’autres approches.

Cela a aussi permis de nous faire monter en compétences, de mieux comprendre les pathologies et les traitements.

De plus, se voir permet de voir les visages, c’est moins impersonnel que par téléphone et les échanges créent des liens de confiance.

Les familles et aidants de résidents participent ils aux téléconsultations ? Quels sont leurs retours ?

Les familles peuvent participer aux téléconsultations. Elles ne participent pas aux téléexpertises. Lorsque la téléexpertise a été validée avec le médecin traitant, les infirmiers appellent la famille ou envoient le compte-rendu.

La famille est systématiquement contactée en amont pour les tenir informer de ce qui va être fait. Les familles sont satisfaites. La téléconsultation évite le déplacement du résident et permet de limiter le coût financier du déplacement pour la famille.

Nous avons déjà fait des téléconsultations avec des familles, lorsque la personne ne pouvant pas se déplacer pour une consultation avec le gériatre de suivi ou lors de la mise en place de protection judiciaire. Dans ces cas précis, la famille peut y assister, si le médecin gériatre l’expert mandaté par le tribunal le souhaitent .

Quels conseils donneriez vous aux futurs utilisateurs de TéléO ?

Au moment de la téléconsultation, il vaut mieux avoir le logiciel métier en accès direct ou avoir édité en papier les éléments pour présenter la situation du résident au médecin. On édite le traitement, tous les documents envoyés. Cela permet d’être plus fluide.

Essayer de faire participer les équipes : au moins un infirmier du service et un aide-soignant, dans la mesure du possible. Il n’est pas nécessaire que l’aide-soignant soit présent sur la totalité de la téléexpertise, mais inclure l’équipe de terrain est important. Nous sommes tous des maillons de la chaine de la prise en soins de nos personnes âgées accompagnées. Les aides-soignants au contact proximal avec les personnes âgées peuvent observer des détails importants à donner aux médecins gériatres.

Quelles améliorations suggérez vous pour l’outil et le dispositif ?

C’est fluide. Je ne vois pas d’améliorations majeures à prévoir.