Trois ans après le lancement du Système de Partage d’Information et de Coordination en Occitanie (SPICO), quel est le bilan ? Mathilde Sabourin, responsable de l’offre Coordination, présente les usages et les perspectives 2024.
Quels sont les principaux besoins auxquels répondent les services numériques de coordination ?
Les patients et les usagers ont besoin que leur prise en charge soit coordonnée entre tous les professionnels, en particulier pour les parcours complexes. Les pouvoirs publics mettent des moyens importants depuis plusieurs années face à cet enjeu majeur. La réponse s’articule autour d’un axe organisationnel, avec la transformation des dispositifs de coordination, et d’un axe sur les services numériques de coordination, pour simplifier et sécuriser les échanges et fluidifier les parcours.
La principale attente remontée par les professionnels lors de la concertation régionale en 2019 portait sur la mise à disposition d’un outil commun sur l’ensemble de la région, interopéré avec leurs propres outils métiers. Les acteurs de terrain ont précisé leurs besoins lors d’ateliers de co-construction. Deux briques fonctionnelles ont été identifiées, l’une pour répondre aux besoins de coordination usuelle directe entre professionnels, l’autre pour le partage de données dans un dossier sécurisé. C’est ce qui a été mis à disposition, avec la Messagerie instantanée SPICO Discussions en 2020 et SPICO Dossiers en 2021.
Les attentes des professionnels incluent la facilité et la rapidité d’usage. Sur ce point, certains dysfonctionnements de l’outil et la difficulté à concilier sécurité et simplicité ont pu aboutir à une expérience utilisateur parfois décevante. La réponse doit encore être améliorée.
Quels sont les usages aujourd’hui en Occitanie ?
La moitié des 8200 professionnels de la région qui ont activé un compte sur SPICO l’utilisent régulièrement. Il s’agit principalement d’infirmiers et de médecins. D’autres professionnels paramédicaux et des administratifs sont également utilisateurs.
Les 13 Dispositifs d’Appui à la Coordination en Occitanie coordonnent les parcours complexes via SPICO Dossiers et l’ont adopté comme outil métier.
Des dispositifs dédiés s’appuient sur cet outil régional pour la coordination de la prise en charge d’enfants vulnérables (parcours Cocon), de jeunes patients souffrant de troubles du neuro-développement (parcours TND) ou de troubles spécifiques du langage et des apprentissages (parcours Occitadys).
Quels sont les freins aux usages ?
Nous sommes bien conscients que les professionnels se heurtent à certaines difficultés.
Premier frein, il faut attendre plusieurs jours, après son inscription, pour la création effective du compte, et donc l’utilisation de l’outil. Nous travaillons actuellement à une réduction de ce délai. Mais il y a aussi un temps incompressible pour s’assurer que le professionnel est bien un professionnel habilité. Il s’agit d’échanger des données sensibles et on ne peut pas donner accès à un compte SPICO comme un compte WhatsApp !
Deuxième frein, des professionnels ont expérimenté des lenteurs ou des anomalies de fonctionnement ou des difficultés pour se connecter. Le temps étant ce qui manque le plus pour les professionnels de la santé et du social, une expérience décevante suffit pour stopper des usages. Nous devons arbitrer entre les évolutions, réalisées en réponses aux demandes de terrain, et le risque de complexifier et de fragiliser l’outil. Le stabiliser est devenu une priorité. Il y a déjà de nettes améliorations de performance depuis la mise en production de la dernière version de l’outil.
Le frein de l’interopérabilité existe aussi pour certains professionnels, notamment les médecins libéraux. A ce jour, SPICO n’est pas interopérable avec leur logiciels métiers. Pour lever ce frein, il faut que les éditeurs des différents outils soient d’accord pour s’interopérer, ce qui n’est pas toujours le cas. C’est comme pour un mariage la motivation d’une seule partie ne suffit pas ! La feuille de route SPICO compte encore plusieurs chantiers !
Quelles sont les perspectives ?
La stabilisation de l’outil se poursuit, ainsi que les travaux d’interopérabilité, de conservation des données et de mise à disposition d’indicateurs. Nous renforçons l’accompagnement des professionnels, notamment auprès des acteurs de la coordination sur les usages de SPICO Dossiers. Un partenariat avec le Guichet CPTS vise à renforcer l’accompagnement des CPTS, pour améliorer et cibler la réponse aux besoins.
La multitude d’acteurs de la coordination a convergé vers de nouvelles organisations. Les projets et les structures que nous accompagnons aujourd’hui sont relativement récents, les DAC, les PCO et aujourd’hui les CRT (Centres de Ressources Territoriaux) mais aussi les CPTS ou les projets expérimentaux (dont article 51).
Nous nous adaptons à ces dynamiques dans l’objectif de simplifier et sécuriser les échanges et de fluidifier les parcours.
Le projet SPICO s’inscrit dans le projet national SNACS (Services numériques d’Appui à la Coordination), dans le programme e-Parcours, généralisé en 2018. Les objectifs sont définis dans un cadre national et ensuite chaque région choisit le ou les outils pour y répondre, en respectant le cahier des charges détaillé. L’ARS Occitanie priorise les parcours à accompagner sur le volet numérique selon les enjeux régionaux. La feuille de route du GRADeS pour le développement de la coordination entre les professionnels est donc établie selon les priorités du Projet Régional de Santé (PRS).